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Le recours à la Loi sur les mesures d’urgence est ratifié en Chambre

Michel Saba, La Presse Canadienne
Le recours à la Loi sur les mesures d’urgence est ratifié en Chambre

MONTRÉAL — L’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence a été ratifiée par la Chambre des communes, lundi soir, les libéraux ayant pu compter sur l’appui des néo-démocrates.

Bloquistes et conservateurs se sont opposés à la motion de ratification, mais ils ne cumulaient pas assez de voix pour défaire celle-ci.

La motion a été entérinée à 185 votes contre 151.

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh avait mis fin à tout apparent suspense , plus tôt lundi. Il a confirmé en point de presse que sa formation politique n’avait pas changé d’avis et allait appuyer «avec réticence» le gouvernement lors d’un vote crucial sur la Loi sur les mesures d’urgence qui doit se tenir en soirée. Le Bloc québécois et les conservateurs sont contre.

«La menace est toujours là», a expliqué M. Singh, faisant référence à des camionneurs et à leurs partisans qui sont toujours présents, en retrait, dans la région d’Ottawa.

Selon lui, le pays fait clairement face à une «crise nationale» et à une «sérieuse attaque sur notre démocratie».

Le chef néo-démocrate a cependant prévenu que ça ne sera pas un chèque ne blanc. «Nous sommes prêts à retirer notre appui et à forcer un vote sur la Loi sur les mesures d’urgence dès que nous croyons qu’elle ne sera plus nécessaire», a-t-il dit. Et cet appui «ne va pas continuer pour (…) tous les 30 jours» prévus par la loi.

Un comité de députés néo-démocrates analysera d’ailleurs la situation et pourrait recommander que l’appui soit retiré.

La Loi sur les mesures d’urgence prévoit que si au moins 20 députés ou 10 sénateurs signent une motion demandant l’abrogation de la déclaration de situation de crise, la chambre concernée votera sur la motion au terme d’un débat ininterrompu d’au plus dix heures devant se tenir dans les trois jours de séance qui suivent.

«Nécessaire», dit Trudeau

Le premier ministre Justin Trudeau a défendu, en matinée, la «nécessité» d’avoir recours à la Loi sur les mesures d’urgence.

Lors d’une conférence de presse, il a plaidé que de déclarer l’état d’urgence il y a une semaine a permis de prendre des mesures que ne permet aucune autre législation.

Il a notamment indiqué que les policiers peuvent désormais contraindre des remorqueurs de retirer des camions ou encore désigner des routes amenant à des postes frontaliers comme des zones ne pouvant pas être occupées.

Et «cet état d’urgence n’est pas terminé», bien que les blocages aient été levés aux frontières et que la situation s’améliore à Ottawa où les policiers ont délogé les camionneurs du centre-ville au cours des derniers jours.

«Nous savons qu’il y a toujours un certain nombre de personnes affiliées aux blocages illégaux qui sont dans la région, a déclaré le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino. Nous devons demeurer vigilants.»

Des tentatives de bloquer le poste frontalier situé à Surrey, en Colombie-Britannique, ont eu lieu dans les derniers jours, a-t-il dit, et la situation à proximité du pont Ambassador, à Windsor, en Ontario, est suivie attentivement.

Le premier ministre a assuré qu’il ne maintiendrait la loi en vigueur pas «une journée de plus que ce qui est nécessaire».

Vote de confiance

M. Trudeau a refusé de dire clairement si la motion sur laquelle se sont prononcés les députés en soirée était un vote de confiance, soit un vote qui  avait le potentiel de faire tomber le gouvernement et déclencher des élections.

«Je ne peux pas imaginer que quiconque vote contre ce projet de loi exprime autre chose qu’un profond manque de confiance à l’égard de la capacité du gouvernement à assurer la sécurité des Canadiens à un moment extrêmement important», a-t-il indiqué.

Le député libéral de Louis-Hébert, Joël Lightbound, a quant a lui relevé que la possibilité d’un vote de confiance planait. Durant une intervention en Chambre, il en a appelé à plus de clarté.

«Si le vote de ce soir n’était pas un vote de confiance, je voterais contre. Mais j’aimerais à tout le moins, en prévision de ce vote, savoir de manière claire et sans équivoque qu’il s’agit bel et bien d’un vote de confiance», a déclaré celui qui a critiqué le gouvernement dont il fait partie, il y a quelques semaines, pour son ton et sa rhétorique. 

«Depuis 2015, on a un contrat moral au sein du parti libéral. Un contrat qui veut qu’en tant que député, on se doit de voter avec le gouvernement sur des votes de confiance, sur des engagements électoraux ou encore sur des questions qui touchent les droits fondamentaux des Canadiens protégés par la Charte», a-t-il ajouté.

M. Lightbound a soutenu qu’il n’était «pas convaincu» que les pouvoirs décrétés en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence étaient et continuent d’être nécessaires aux forces policières. Néanmoins, il a ajouté qu’«il ne faut pas lire dans (s)es propos un désaveu du gouvernement».

Le chef néo-démocrate a pour sa part déclaré avoir «toujours su, dès le début» que le vote de lundi soir était un vote de confiance compte tenu du sérieux des implications du recours à la Loi sur les mesures d’urgence.

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a pour sa part dénoncé le manque «de courage» de M. Trudeau qui invoque «la loi la plus contraignante de l’arsenal juridique» et qui, par «peur de se planter», menace d’en faire un vote de confiance.

«À l’intérieur du caucus du premier ministre, ils ont des gens dont la conscience dit: «pas sûr que je veux faire ça»; au NPD, ils ont des gens dont la conscience dit: «pas sûr qu’on veut voter en faveur de ça nous autres»», a-t-il expliqué.

Les conservateurs critiquent vivement la décision du gouvernement et certains demandent aux libéraux de révoquer la loi maintenant que les blocages qui ont effectivement fermé la ville pendant plus de trois semaines semblent être terminés.

Lors de la période des questions, en après-midi, la cheffe conservatrice par intérim, Candice Bergen, a demandé au gouvernement quels critères lui permettront de déclarer la fin de l’état d’urgence. M. Trudeau lui a répondu que ce sera «dès que ces mesures ne seront plus nécessaires». 

Si la motion avait été défaite lors du vote à la Chambre des communes, la loi et tous les pouvoirs extraordinaires qui en découlent auraient été annulés.

Le Sénat doit également voter sur l’utilisation de la loi, mais un débat doit d’abord se tenir dès mardi avant-midi.

– Avec des informations d’Émilie Bergeron

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